Mobilité: La science aide les collectivités à la mise en place de politiques publiques efficaces

René Schumann est professeur-chercheur au sein de l’Institut informatique de la HES-SO Valais-Wallis depuis de nombreuses années. Jamais à court d’un trait d’esprit ingénieux, son humour est aussi affuté que son intelligence est vive. Trilingue, il est souvent assisté dans son équipe par des post-doctorants aux parcours et origines variées. Peut-être est-ce cette ouverture d’esprit qui l’a naturellement dirigé vers le thème de la mobilité ? C’est plutôt un esprit brillant qui n’a de cesse de chercher des réponses scientifiques à des problèmes complexes. Ainsi, avoue-t-il que c’est parce que c’est « un secteur difficile qui implique de nombreuses parties prenantes décisionnaires, de l’utilisateur au politique, et qui implique aussi des réactions très émotionnelles » qu’il s’intéresse à la mobilité. René Schumann aime donc les défis quasiment insolubles et les questions de recherche complexes.

 

Valoriser les données existantes

Il nous explique qu’il existe beaucoup de données relatives à la mobilité et que certaines sont même en accès libre comme celles de l’Office fédéral de la statistique. Pourtant, un accès aux données n’est pas suffisant car il faut pouvoir les faire parler en les valorisant. Le SI Lab – Smart Infrastructure Lab (laboratoire d’infrastructures intelligentes) dirigé par René Schumann s’y attèle. Contrairement à d’autres domaines de la durabilité, il existe énormément de parties prenantes dans la mobilité qui se trouve impactée à chaque instant par les actions des utilisateurs. Il est également difficile d’infléchir le comportement des personnes privées car cela relève de la liberté de déplacement qui est perçue comme une liberté essentielle. Ainsi, les changements de politique publique provoquent des réactions parfois violentes (pensons aux Gilets jaunes en France ou aux achats paniques des Anglais en 2021 lorsque la pénurie d’essence risquait). Un véhicule privé est synonyme de liberté mais est parfois indispensable aux personnes vivant dans des régions périphériques. Les choix politiques sont donc délicats dans ce domaine car chaque acteur défend une logique qui lui est propre (financière, d’optimisation ou électorale). Ainsi, pour prendre les décisions qui sauront répondre aux attentes de la population et mettre en place des politiques publiques efficaces et durables, il est important de pouvoir se baser sur la science des données.

 

Jumeau numérique – une simulation du réel

Afin de permettre aux représentants politiques de prendre les meilleures décisions, le SI Lab souhaite leur fournir des recommandations basées sur des preuves scientifiques. Les données actuelles existantes sont utilisées dans des modèles crédibles et personnalisés selon les régions. Ce modèle fonctionne grâce au jumeau numérique. En d’autres termes, un jumeau numérique est une reproduction virtuelle d’un système qui est mis à jour en temps réel. Ainsi, le jumeau numérique de l’état de la circulation routière dans la ville de Zurich peut être élaboré à l’aide des données récoltées existantes. Il est alors possible de simuler ce qu’un changement de législation ou une décision politique pourrait avoir comme impact sur la mobilité des Zurichois.

 

Une politique publique fondée sur des preuves scientifiques

Grâce à un partenariat avec l’Université de Zagreb, Krešimir Kušić a travaillé durant une année sur cette thématique au sein du SI Lab. Au bénéfice d’une bourse d’excellence de la Confédération, il a combiné la simulation classique du trafic routier et les données existantes du trafic en en temps réel. Le temps réel n’est ici pas instantané, mais représente une latence raisonnable. Chaque minute, le jumeau numérique reçoit des données du monde réel et la simulation s’ajuste ainsi constamment pour être au plus proche de la réalité. Cela est notamment possible grâce à l’utilisation de la plateforme open data pour la mobilité en Suisse fourni par l’Office fédéral des Routes qui vise à devenir la plateforme nationale de la mobilité. Le SI Lab peut ainsi créer de la valeur avec ces données et construire un jumeau numérique. Celui-ci est capable de se nourrir d’informations réelles et de fournir une simulation aussi détaillée que possible de la situation en incluant le nombre de véhicules et leur vitesse à un endroit particulier du trafic.

 

SI Lab – un véritable laboratoire de la mobilité

Au sein du SI Lab, différents projets sont en cours en lien avec la mobilité. L’un des projets tente de prévoir ce qu’il va se produire entre un point A et un point B du trafic en analysant un modèle d’autoroute près de Genève. L’idée est de proposer une estimation du trafic dans d’autres points du réseau routier, d’y tester des stratégies de contrôle du trafic et éventuellement de réaliser des prédictions de trafic. D’autres projets en lien avec la mobilité sont réalisés par l’équipe de René Schumann, notamment un Flagship Innosuisse qui a pour but d’étudier et de réduire le trafic de marchandises dans une zone urbaine. Le SI Lab réfléchit à l’élaboration d’un système de modélisation basé sur des agents (modèle informatique permettant de simuler des actions et interactions). Ce modèle pourrait permettre de réfléchir à de nouveaux modèles de transports et notamment aider à répondre à un certain nombre de questions : quel est le comportement de la population en matière de transport privé et public, quelles politiques publiques faut-il appliquer et quelles sont leurs conséquences ? Pourquoi et comment promouvoir un type de mobilité plutôt qu’un autre ?

 

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Prof. Dr. René Schumann

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